- 8 décembre 2021
- Catégorie : Actualités du cabinet
La loi ELAN du 23 novembre 2018 avait signé le retour des chambres consulaires au sein des commissions départementales d’aménagement commercial (CCI, CMA et chambre d’agriculture). Leurs représentants siégeaient sans toutefois prendre part au vote. Une porte s’entrouvrait donc à nouveau vers l’appréciation économique des projets, aux côtés des critères de l’aménagement du territoire, du développement durable et de la protection des consommateurs.
Tout le monde ne l’entendait pas ainsi et le Conseil Nationale des Centres Commerciaux a sollicité auprès du Conseil d’Etat l’annulation des dispositions du décret n° 2019-331 du 17 avril 2019 relatif à la composition et au fonctionnement des CDAC et aux demandes d’AEC. Le Conseil d’Etat, manifestement embarrassé par la question avait sursis à statuer sur la requête jusqu’à ce que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) se prononce sur le point de savoir si droit de l’Union, en particulier la directive 2006/123 dite « directive Services », s’opposait à la présence, au sein d’une instance collégiale compétente pour émettre un avis sur une AEC, d’une personnalité qualifiée représentant le tissu économique. Son rôle se borne pourtant à présenter la situation du tissu économique dans la zone de chalandise pertinente et l’impact du projet sur le tissu économique, sans prendre part au vote sur la demande d’autorisation.
Par un arrêt du 15 juillet 2021 (C-325/20), la CJUE a jugé que la présence de tels membres, même s’ils ne prennent pas part au vote, était incompatible avec la directive pour autant que les concurrents actuels ou potentiels du demandeur participent à la désignation des personnalités présentes.
A la suite de cette décision, le Conseil d’Etat a constaté que les CCI sont notamment composées de commerçants, chefs d’entreprises, représentants de sociétés commerciales ou de sociétés à caractère commercial et que les CMA comportent notamment des professionnels exerçant une activité commerciale. Autrement dit, de concurrents actuels ou potentiels du demandeur d’une autorisation d’exploitation commerciale. C’est ainsi qu’il a été considéré que la présence de personnalités qualifiées désignées par les CCI et les CMA est bien de nature à permettre l’intervention indirecte de personnes désignées par des opérateurs concurrents des demandes d’autorisation d’exploitation commerciale. En revanche, les missions et la composition des chambres d’agriculture ne permettent pas de les regarder comme constituées d’opérateurs concurrents des demandeurs d’autorisation d’exploitation commerciale et de conclure à cette même incompatibilité.
C’est ainsi que le Conseil d’Etat a jugé que les dispositions modifiées de l’article L751-2 du code de commerce en tant qu’elles comprennent des personnalités qualifiées désignées par les CCI et les CMA, sont incompatibles avec les objectifs de la directive Services et que les dispositions du décret du 17 avril 2019 prises pour leur application, sont illégales dans la même mesure. En conséquence il a prononcé l’annulation de :
- l’article 1er du décret du 17 avril 2019, en tant qu’il modifie l’article R751-1 du code de commerce s’agissant de son application aux personnalités qualifiées désignes par la CCI et la Chambre des Métiers et de l’Artisanat ;
- l’article 2 du décret, portant sur l’article R751-3 du code de commerce, qui aménage la composition de la CDAC dans le cas particulier où la zone de chalandise d’un projet d’équipement commercial dépasse les limites d’un seul département.